L’Ombre du chardon, tome 3 : Suisen – Aki Shimazaki

Titre : Suisen
Saga : L’Ombre du chardon, tome 3
Auteur : Aki Shimazaki
Éditeur : Actes Sud
Nombre de pages : 144
Quatrième de couverture : Chef d’entreprise prospère, marié et père de famille censément comblé, Gorô se voit contraint de reconsidérer l’équilibre de son existence et de se regarder en face le jour où toutes ses convictions sont ébranlées.

J’avais hâte de commencer cette lecture et de découvrir quel personnage nous présentait Aki Shimazaki dans ce troisième tome de l’ombre du chardon.
Et là, j’ai eu la mauvaise surprise de constater que c’était Gorô, un personnage qui me dérangeait dans le premier tome.

Faisons donc le point sur ce personnage : il est le président de la sakaya Kiya (marchand de spiritueux). Il a hérité de la société fondée par son grand-père. Il est marié et a deux enfants. Son aînée est à l’université et il compte lui organiser un miai avantageux. Son fils est lycéen, il le destine à reprendre la société familiale. Il a aussi plusieurs maîtresses à qui il impose sa volonté.
Bref, vous l’aurez compris, c’est un personnage arrogant, hautain et tyrannique. Il est loin d’imaginer que sa vie va progressivement déraper.

Sur les deux tiers du roman, on le suit, on découvre sa vie. Puisqu’il est le narrateur, le lecteur se prend en pleine tronche sa suffisance. En un mot comme en cent, c’est un connard : que ce soit avec ses enfants, sa femme, sa belle-mère qui l’a aimé comme un fils, ou avec sa demi-sœur et sa famille qu’il méprise parce qu’ils sont plus brillants que lui.
Puis il se prend le retour de bâton et ça a fait du bien. Je suis peut-être mauvaise, mais je me suis réjouie de son malheur ; il n’a eu que ce qu’il méritait. Par contre, quand il commence enfin à se comporter comme un humain et qu’il éprouve un peu de la compassion qui lui manquait pour être humain, le roman s’est terminé. Une fin prématurée qui était frustrante.

J’espérais aimer autant ce troisième tome que les deux autres, mais ce n’est pas le cas en raison du personnage m’as-tu-vu qu’est Gorô. Je mentirais si je disais que je n’étais pas déçue.
Malgré ça, j’ai hâte de lire le prochain tome et de découvrir quel personnage nous sera dévoilé.

Coupe des 4 maisons :
Filet du diable (5ème année) – un livre que vous pensiez aimer mais qui est une déception50 points

Le Péché originel de Takopi, tome 2 – Taizan5

Titre : Le Péché originel de Takopi, tome 2
Auteur : Taizan5
Éditeur : Pika (Shônen)
Nombre de pages : 200
Quatrième de couverture : Le corps sans vie de Marina a été retrouvé. Mais Shizuka, imperturbable lors des interrogatoires de la police, continue de s’adonner aux préparatifs de son voyage. Azuma, de son côté, fait tout son possible pour dissiper le moindre soupçon. Une fois les vacances d’été arrivées, Shizuka se rendra enfin chez son père à Tokyo, avec Takopi à ses côtés… Mais la jeune fille y trouvera-t-elle seulement ce qu’elle espère ?

Dans ce second tome, on découvre ce que je redoutais et avais senti dans le précédent : Shizuka a complètement pété une durite… c’est d’ailleurs aussi le cas de Marina… mais comment se fait-ce puisqu’elle est morte dans le premier ? Je vous laisse le découvrir en lisant cette saga.
D’ailleurs, son corps vient d’être retrouvé. Donc, la police enquête sur le meurtre de la fillette, ce qui change les plans d’Azumi et de Shizuka, à savoir se rendre chez le père de cette dernière à Tokyo pendant les vacances d’été afin d’aller chercher son chien Chappy. On sait que cette quête sera vaine puisque sans aucun doute, l’animal a été euthanasié après avoir mordu Marina – je vous avais dit que c’était un manga super gai -_-

Les personnages sont tout aussi torturées que dans le premier, mais ils prennent un peu moins cher, sauf peut-être Takopi, parce qu’ils font des choix afin de moins subir.
Comme c’est le tome final, on a toutes les réponses aux questions qu’on se posait depuis le début, c’est une série courte, mais il y a quand même quelques points à éclaircir et notamment la raison pour laquelle Takopi ne peut plus rentrer chez lui, raison dont il ne se souvient pas. J’avais émis l’hypothèse qu’il avait utilisé l’horloge de sa planète à mauvais escient et que ça aurait eu des conséquences catastrophiques. Il y avait de ça. Par contre, j’ai été surprise en découvrant son passé… je ne m’y attendais pas du tout.

Je n’ai pas parlé des dessins, pourtant je les trouve très chouettes. J’adore le character design qui a des airs de Toilet-bound Hanako-kun. Les visages des personnages sont très expressifs et j’ai pris beaucoup de temps pour les détailler et les analyser.
En conclusion, j’ai un peu moins aimé que le premier, mais ça reste malgré tout un coup de cœur.

Comme je l’avais dit dans ma chronique du premier tome, j’ai acheté le coffret le péché originel de Takopi qui contient les deux tomes de la saga ainsi qu’un petit livret du nom de Hymne qui est une histoire courte et inédite, celle qui a révélé l’auteur Taizan5. Pour faire bref, on découvre la vie de la jeune Yuka qui habite seule et suit un cours sur l’histoire du Japon. Elle est la seule élève puisque la démographie a fait une chute vertigineuse.
Le personnage m’a laissée indifférente. Et les dessins sont moins travaillés, on sent que ce sont les débuts de l’auteur. Quand à l’histoire, elle s’est laissée lire, sans plus.

Le Péché originel de Takopi, tome 1 – Taizan5

Titre : Le Péché originel de Takopi, tome 1
Auteur : Taizan5
Éditeur : Pika (Shônen)
Nombre de pages : 216
Quatrième de couverture : Takopi est un petit extraterrestre arrivé tout droit de la planète Happy, pour répandre la joie sur Terre ! Sauf que la première personne à lui tendre la main est Shizuka, une fillette au visage infiniment triste… Aussitôt, Takopi se donne pour mission de lui rendre le sourire à l’aide de ses fantastiques « happy gadgets » ! Mais le petit alien est loin d’imaginer la noirceur de l’environnement dans lequel évolue l’écolière. L’innocence et la bonne volonté de Takopi vont peu à peu l’entraîner dans une situation inextricable… Jusqu’à ce que le pire se produise.

Il y a quelques semaines, mon homme m’a envoyé un article sur le péché originel de Takopi, ça avait l’air pas mal donc quand il est sorti ce mois-ci, je n’ai pas hésité à m’acheter le coffret.
Je ne m’attendais cependant pas à une telle lecture. Mon libraire m’avait prévenue que ce n’était pas très gai, mais à ce point, c’est terrible !
Je pensais que ce serait une histoire post-apocalyptique ce qui expliquerait le ton sombre du récit. Or, ce n’est pas le cas.

Takopi est un happien, un poulpe extraterrestre tout mignon qui vient de la planète Happy. Il est sur Terre pour répondre le bonheur, autant essayer de remplir sa mission avec le premier terrien qu’il rencontre, la jeune Shizuka. Pour cela, il a des gadgets que la fillette refuse d’utiliser.
Le lecteur comprend assez vite que quelque chose cloche dans la vie de Shizuka, elle se fait malmener par ses camarades et c’est violent aussi bien physique que psychologique. Une histoire de harcèlement scolaire qui va très loin.

Malheureusement, Takopi ne voit rien, ne comprend rien, parce qu’il n’est pas terrien, il n’a pas les codes et personne ne lui explique rien. Il est là tout joyeux avec l’espoir de rendre Shizuka heureuse, ses nombreuses tentatives infructueuses pour la faire sourire. Il est en total décalage avec les événements dramatiques qui frappent l’héroïne. C’est déroutant et dérangeant, ça rend la situation encore plus tragique.

En ce qui concerne les personnages, je ne sais pas si j’apprécie Shizuka, mais je la plains sincèrement, j’ai eu de la peine pour elle.
Marina est ignoble : quand on connaît le contexte familial dans lequel elle vit, on comprend qu’elle soit si cruelle, mais c’est une cruauté qui la rend injuste… on comprend, mais ça n’excuse pas son comportement.
Azumi semble sympathique, le pauvre est embarqué dans cette histoire sordide. Il sera sûrement plus présent dans le prochain tome.

Je ne vais pas encore blablater pendant des heures. C’est un coup de cœur pour ce premier tome et j’espère que le second sera tout aussi bien.

Petites fables destinées au néant – Carino Bucciarelli

Titre : Petites fables destinées au néant
Auteur : Carino Bucciarelli
Éditeur : Traverse
Nombre de pages : 143
Quatrième de couverture : Le buffle qui créa le monde s’en prend à un autre créateur. Je me débats afin que la colère des deux ennemis ne trouble pas notre humble planète. Notre Terre a été expulsée jadis d’un de ses naseaux ; et il chérit plus que tout, parmi les myriades de galaxies, ce minuscule habitat où les humains s’agitent…
« Existons-nous réellement » aurait pu être un autre sous-titre de ce nouveau livre de Bucciarelli. L’auteur, qui a déjà deux recueils de nouvelles à son actif, L’inventeur de paraboles (1997) et Dispersion (2018), dans lesquels l’insensé fait office de loi, nous offre ici une troisième série ou l’irrationnel prend le pas au point que toutes les références de la logique semblent s’effondrer. Et pourtant, au creux de l’insolite, une étrange cohérence se fait jour. Dans chacune de ces nouvelles, s’étalant sur à peine un tiers de page ou tout au plus sur une page, un petit monde fonctionne en vase clos. Et ainsi se dessine en chaque fable notre vocation à ne pas être nous-mêmes ou à ne pas être du tout.

Je tiens avant tout à remercier masse critique Babelio et les éditions Traverse pour la confiance qu’ils m’ont accordée en me choisissant pour ce partenariat.

Ma chronique va être difficile à rédiger en raison du format de cet ouvrage. Je ne pourrais pas faire de résumé, parce qu’il n’y a pas vraiment de fil rouge, en tout cas, je suis bien incapable de l’expliquer, donc autant utiliser les mots de l’auteur : la thématique des fables tournent

« autour du regard sur notre éventuelle présence ou non-présence dans un monde hypothétique. »

C’est un beau programme qui est traité avec une grande variété : le message peut passer à travers les mots, la création, la non existence, l’ennui, etc.

Je pensais que cet ouvrage se composerait de quelques fables genre une dizaine, mais pas autant : il y en a plus d’une centaine ; une majorité tient en une page et quelques rares autres en deux pages. Souvent, elles sont toutes construites à partir d’une histoire puis développent une idée. C’est réussi : le récit est fluide, ça se lisait tout seul, ce qui ne devait pas être évident à écrire.
Les thèmes sont variés et chacun y trouvera une ou plusieurs fables qui lui parlent.

Celles que j’ai préférées sont celles qui, en une phrase révélaient des évidences et me permettaient de développer ma pensée autour du thème abordé. Ça a été le cas avec l’une sur l’ennui, mais je n’ai pas le titre et je n’ai pas réussi à la retrouver ; également Mon drame avec la citation suivante :

« J’aurais pu laisser libre cours à mon penchant naturel et mentir comme beaucoup d’autres pour ainsi m’inventer une triple appartenance, mais l’honnêteté – ou la honte – me freine. Oui, la honte, car une triste éducation m’a été inculquée. Tu seras toi-même ! m’a-t-on imposé dès l’enfance, comme si on pressentait en moi un naturel de qualité. Mais n’est-ce pas la pire formule que de ne pouvoir échapper à sa personne ? »

C’était pour ne citer que ces deux-là. Il y en a bien d’autres qui m’ont plu, surtout celles dont le récit se suivait et s’étalait sur plusieurs fables : Sous la lucarne est plusieurs discussions entre deux prisonniers et se poursuit sur neufs fables.

Les textes sont rythmés, et c’était agréable à lire à haute voix. En tout cas, j’ai pris plaisir à le faire.
J’ai bien aimé ce recueil de fables, ça me changeait de mes lectures habituelles.

L’amour et la mort – Junji Ito

Titre : L’amour et la mort
Auteur : Junji Ito
Éditeur : Mangetsu (Junji Ito)
Nombre de pages : 416
Quatrième de couverture : La ville de Nazumi est recouverte nuit et jour d’un épais manteau de brume. Dans ses ruelles nébuleuses, les adolescents s’adonnent à un étrange rituel de voyance consistant à demander son avenir au premier passant venu. Mais du jeu innocent naît un funeste cortège de suicides sanglants et une rumeur enfle : la Mort rôde aux intersections de la ville, sous les traits d’un séduisant jeune homme qui exacerbe toutes les passions.
Plongez au cœur de dix récits d’amour et de mort orchestrés par le maître de l’horreur, dont deux nouvelles consacrées à la sinistre famille Hikizuri.

Quand ma fille et moi avons vu ce manga à la librairie, samedi, on a craqué : on est toutes les deux fans de Junji Ito ; de plus, la couverture est splendide et ça résume bien l’ambiance du premier récit.
Il y a plusieurs histoires.

L’amour et la mort.
Ryūsuke est lycéen, il retourne dans sa ville natale, Nazumi, pour le travail de son père. Mais la situation n’enchante pas l’adolescent. On comprend assez vite qu’il a dû vivre une histoire traumatisante en relation avec la tradition de la ville : lors de journées particulièrement brumeuses, les habitants se postent à un carrefour et jouent à « l’oracle à la croisée des chemins » consistant à poser une question qui tracasse le tourmenté à la première personne qu’il croise… et sa réponse est censée se réaliser.
Bien sûr, ça tourne mal et les jeunes femmes, habitées par le « beau jeune homme à la croisée des chemins », mettent fin à leurs jours.
On retrouve le thème de la légende urbaine, enflée par la rumeur. C’était déjà le même principe avec Tomie que j’avais adoré. Mais dans cette histoire, c’est bien amené, l’angoisse monte en puissance et le côté inexplicable est prégnant, ce ne sont pas juste des folles… j’y ai retrouvé l’ambiance qui me plaisait tant dans Spirale, mais en un peu moins bizarre.
Les dessins sont superbes. On retrouve bien la patte de Junji Ito et ça a été un plaisir de m’attarder sur des détails. « Le beau jeune homme à la croisée des chemins » est fascinant : à la fois beau et terrifiant. La nana aux tatouages m’a sciée tellement son corps est métamorphosé – pour elle, j’ai pris énormément de temps pour observer ses tatouages et pareil, ça m’a subjuguée autant qu’horrifiée.

L’étrange fratrie Hikizuri.
Narumi en a marre et suit sa famille composée de ses frères et sœurs, leurs parents étant décédés. Elle s’installe chez un ancien camarade de classe Kotani, mais c’est sans compter ses frangins qui la récupèrent pour son plus grand malheur.
C’est un résumé très succinct. Cette histoire ne se compose que de deux chapitres, mais elle est très dense donc je ne peux pas en dire davantage sans spoiler.
Chaque membre de cette famille est étrange… c’est un peu faible comme terme, je les ai vraiment trouvés aussi glauques que dérangeants. Et y en a pas un pour rattraper l’autre.
J’ai détesté chacun des personnages, pourtant j’ai adoré l’histoire.

La maison des douleurs fantômes.
Kozeki est embauché pour travailler à domicile dans une famille riche. Mais quand il arrive, il se rend compte que quelque chose ne tourne pas rond : la maison est cloîtrée, les fenêtres murées. Le fils de la famille est alité : il ressent une forte douleur qui s’est étendue à toute la maison comme une douleur fantôme et c’est aux employés de le soulager…
Un récit très étrange, rondement mené avec une fin prévisible.

Les côtes.
Yuki n’aime pas son corps, elle est complexée par sa taille qui manque de finesse. Elle décide de se faire ôter les côtes sans savoir qu’elle n’est pas la première qui a fait ça.
On n’a pas trop le temps de s’attarder sur les personnages parce que l’histoire est courte. Pourtant, elle est efficace : un brin angoissante parce que même si on sait ce qui va se passer, on ignore la conclusion de cette affaire, ce qui rend cette lecture passionnante. Jusqu’où Junji Ito ira-t-il ?

On termine ce manga avec un récit ultracourt, quatre petites pages : Le souvenir de l’étron plus vrai que nature.
Rien à en dire, je laisse le soin au lecteur de la découvrir.

Mon histoire préférée reste indéniablement la première qui est très entêtante et qui éclipse forcément les autres, sans pour autant leur ôter leur intérêt.
C’est un coup de cœur pour ce manga.