Titre : Démons Japonais
Auteur : Collectif
Éditeur : Editions Luciférines
Nombre de pages : 355
Quatrième de couverture : Vous pensiez avoir rencontré une jolie femme, un adorable chat ou un enfant espiègle ? Ne vous fiez pas aux apparences, car dans la mythologie japonaise, elles sont souvent trompeuses. Esprits vengeurs, fantômes tourmentés, femmes-araignées ou cannibales, kimonos hantés, chats voleurs de corps et carpes légendaires : les yōkai peuvent prendre des apparences variées, souvent inattendues. On les croise sans le savoir dans des jeux vidéo, mangas et films d’horreur asiatiques.
De nature ambivalente, les yōkai brouillent les limites entre le monde matériel et le monde spirituel. Parfois nuisibles, ils ne se manifestent jamais par hasard et pourraient être une incarnation des désordres laissés dans notre époque.
17 nouvelles fantastiques vous mèneront à la rencontre de 20 créatures surprenantes pour un voyage au cœur de la magie cachée du Japon. Grâce aux articles illustrés qui accompagnent les récits, les yōkai n’auront bientôt plus aucun secret pour vous.
Ce n’est un secret pour personne que les éditions Luciférines, c’est ma maison d’édition préférée. Je les ai découverts avec leur anthologie Maisons hantées et depuis, j’ai collectionné tous leurs livres. Je les ai quasiment tous lus et aimés de par leurs histoires autant que la qualité croissante de leurs ouvrages.
Je dois bien avouer que pour le moment, l’anthologie Démons Japonais est ma préférée – il me reste certains livres à découvrir, notamment Civilisations disparues, alors peut-être sera-t-elle détrônée, mais rien n’est moins sûr.
Elle est variée de par ses récits, les lieux où se déroule l’histoire, et le style narratif des auteurs. 17 nouvelles avec un yōkai différent à chaque fois, 20 illustrations par 5 illustrateurs pour accompagner les 20 articles sur les démons.
L’anthologie est imprimée en deux couleurs : noire et rouge, les titres ainsi que les dessins.
La couverture est magnifique et le titre en dorure ajoute à la beauté de l’ouvrage (Ce n’est pas le cas sur la l’image, mais je vous assure qu’elle est bien dorée). D’ailleurs au sujet de la dorure, je la trouve d’excellente facture : j’ai trimballé l’anthologie partout dans mes sacs pendant cinq jours (avant de la couvrir parce que le livre se cornait) et elle n’a pas pris un pet contrairement à certains livres que j’avais lu où rien que le fait de tenir la couverture en lisant avant fait disparaître la dorure.
Je vais vous présenter vaguement les histoires en évitant les spoilers, suivi de mon avis.
– La malédiction du peintre – Annabelle Blangier
Le narrateur est en cellule. Ses gardiens viennent le chercher et il les exhorte à le tuer si les choses dérape avant de revenir sur son passé et la situation qui l’a amené en prison.
On comprend dès les deux premières pages qu’il n’est pas vraiment responsable des meurtres commis et qu’une entité rôde. Par contre, on ignore laquelle ni comment elle est apparue dans sa vie et on va découvrir tout cela par la suite.
J’ai trouvé que l’histoire avait un côté très européen, ce n’était pas déplaisant et il est loin d’être le seul dans cette anthologie. C’était étrange, déroutant mais surtout, c’était captivant.
– Les fruits du jinmenju – Pierre Bruhlet
Le petit Ari est victime de harcèlement. Le groupe qui le poursuit se débrouille toujours pour le mettre dans des situations délicates par rapport aux règles de l’école jusqu’au jour où cela porte ses fruits et où Ari est puni par le directeur.
L’histoire se situe probablement au Japon, une sensation renforcée par l’ambiance du récit. Pas de grosses surprises sur cette nouvelle, je me suis simplement laissé porter par l’intrigue et j’ai adoré ça.
– Lysandre – Yvan Barbedette
Les inspecteurs Richmonds et Williams mènent l’enquête sur la mort d’une vieille femme. Une fois la scène de crime décrite, on a droit à la retranscription des enregistrements d’Amanda Williams.
Ce choix de récit est étrange, mais au combien intéressant et surtout addictif.
Tout n’est pas immédiatement compréhensible lors de la première lecture qui pose énormément de questions notamment par rapport à la fille de l’héroïne. Une fois arrivé à la fin, on a quelques explications, mais une seconde lecture de cette nouvelle pourrait apporter beaucoup au récit.
– La pêche à la carpe – Audrey Salles
Le narrateur Keiichi et son meilleur ami Yao décide d’aller chasser le poisson-esprit dont la chair a le goût d’enfant. Après leur partie de pêche, ils dorment chez le jeune chinois.
J’ai adoré cette histoire autant que les autres. Elle m’a un peu mis les nerfs en pelote, j’ai bien senti que cette histoire de pêche à la carpe cachait autre chose sans pour autant réussir à mettre le doigt dessus. J’ai passé tout mon temps à chercher le piège et la fin m’a laissé sur ma faim…
– Jeune génération – Philippe Deniel
Deux jeunes gens japonais attendent le dernier métro. Un groupe anglophone leur adresse la parole et les interroge sur l’annonce faite au haut-parleur : une simple excuse pour le retard du métro. Quand il arrive, les deux héros et la bande sont les seuls à le prendre. Étrange, d’autant qu’il ne s’arrête pas aux stations habituellement desservies.
J’ai adoré la confrontation entre les deux mondes : asiatique et occidental. Je trouve que l’auteur a bien réussi à la retranscrire. Dès le début on sait que les deux Japonais cachent quelque chose et, connaissant un peu la légende à laquelle les détails de leur apparence font allusion, je n’ai pas eu trop de mal à savoir de quoi il retournait. Mais malgré ça, je me suis laissé prendre au jeu et j’ai eu très envie de découvrir la chute de l’histoire, rien que pour savoir si cela correspondait à mes connaissances.
– Le Chant de la baleine – Lazarii
L’héroïne de l’histoire vit dans un village, sur une île ou il pleut constamment. Elle est élevée dans la culture maternelle russe, mais elle est attirée par les coutumes paternelles japonaises. C’est ainsi qu’elle découvre la légende de la baleine.
Difficile de faire un résumé de cette nouvelle qui contient beaucoup de chose : l’antagonisme entre Russes et Japonais, les coutumes japonaises, la façon de vivre de leurs ancêtres Aïnous, etc.
J’ai beaucoup aimé cette histoire, mais j’ai l’impression d’être passée à côté, peut-êter parce que je n’ai pas trop accroché à l’héroïne. Malgré cela, j’en sors charmée : j’ai adoré les passages sur la pluie qui sont très beaux, très justes. Il en va de même pour la légende de la Bakekujira racontée par Musume.
– Affamée – Noémie Wiorek
Ludivine est anorexique. Elle assiste à sa dernière séance avec sa diététicienne. Cette dernière la subjugue totalement, la conforte dans ses problèmes alimentaires et la persuade que son problème, c’est sa mère.
J’avoue que le début m’a un peu mise mal à l’aise, surtout les encouragements de la praticienne. C’est nécessaire au bon déroulement de l’histoire, mais c’est délicat comme sujet. C’est la raison pour laquelle j’ai nettement préféré la seconde partie du récit qui sonne plus fantastique.
De plus, pour pleinement apprécier ce récit, il m’a manqué des éléments sur l’origine de Takiyasha et surtout sur son père. Son histoire est contée dans l’article qui suit la nouvelle, mais j’aurais préféré la connaître avant. Je serai quitte pour la relire.
– Les Chats à longue queue – Anne Goulard
Shirô Takeda est fonctionnaire et est chargé de rendre visite aux personnes âgées de sa préfecture afin de vérifier qu’elles soient toujours vivantes. Quand il se rend chez madame Chiba, il constate qu’elle ne vit pas seule : il est accueilli par une adolescente et des chats à longues queues.
Cette fois encore, comme je connaissais le yōkaidont l’histoire fait référence, ce n’était pas une grosse surprise. Je m’attendais également à cette fin, mais le gros point fort de ce récit reste l’atmosphère inquiétante instaurée par l’auteure.
– En attendant le baveux – Johann Vigneron
Cette nouvelle se présente sous forme d’interrogatoire. La prévenue est emmenée dans une salle sans miroir pour y attendre son avocat. Elle ne veut pas rester seule et tape la discute avec le policier qui l’y a conduite. Elle est là parce que son petit ami n’a plus donné signe de vie depuis dix jours et que personne dans l’entourage du disparu ne connaissait l’existence de la jeune femme.
Elle finit par révéler qu’elle ne s’inquiétait pas de son silence parce qu’il l’avait quittée après une dispute au sujet de sa salle de bain et que ce n’est pas la première fois qu’elle vivait ça.
La pauvre raconte ses histoires avec un tel sérieux que c’en est grotesque ! J’en ai ri et ça m’a fait du bien. Un récit tellement absurde que c’en est génial. Une grande réussite pour cette nouvelle.
– La sécheresse des ventres – Tino H.Charroux
Hiromi et Keith ne parviennent pas à avoir d’enfants. Ils s’inscrivent en tant que bêta-testeur sur un nouveau protocole sonore susceptible de la faire tomber enceinte. Pour ce faire, elle doit mettre un casque spécial deux fois par jour et suivre scrupuleusement les instructions données
Un récit tout ce qu’il y a de plus normal entrecoupé d’écoute étrange et dissonante. Ça s’est laissé lire, certains passages étaient prenants, d’autres moins. J’ai trouvé les séances du protocole aussi intéressantes que désagréables. Cette nouvelle m’a laissé une sensation bizarre.
– Jusqu’à la poussière – Natacha Rousseau
Une nouvelle famille de Gaijin emménage dans la maison. Le petit garçon se rend au grenier et se lie d’amitié avec l’esprit d’un ancien kimono abandonné dans un tiroir. En retour, l’esprit s’attache à l’enfant. Les années passent, ils sont heureux jusqu’au jour où le jeune entre à l’internat du lycée.
C’est la première histoire qui est racontée du point de vue du yōkai . Le récit est magnifique : poétique, bouleversant. Les mots me manquent pour dire à quel point cette nouvelle m’a touchée. Et puis, je me suis immédiatement attachée aux deux personnages.
Un gros coup de cœur.
– Le fond des casseroles – Juliette Bas
Michiko est une adolescente boutonneuse qui déteste son apparence et envie sa meilleure amie Ayumi qui, elle, a une peau parfaite. Un soir que l’héroïne va dormir chez son amie, elle profite de l’absence de cette dernière pour chercher son secret de beauté… En vain. Pourtant quelque chose la réveille dans la nuit.
Ça s’est lu très vite et très bien. Les personnages sont bien dépeints surtout le sentiment de jalousie qui ronge Michiko et qui augmente avec sa frustration. La scène avec leyōkai est parfaitement dégoûtante et m’a fait faire la grimace, mais tellement réaliste que je n’ai pu qu’apprécier cette nouvelle.
– Le syndrome de Bakusen – Franck Stevens
Le narrateur est médecin et arrive à la clinique Bakusen pour y travailler. Ce qui l’a décidé à rejoindre cet endroit isolé : la présence de son amie Ayaka dont il n’a plus de nouvelles. Il est accueilli par la directrice madame Higa, aussi vieille qu’effrayante. Elle lui énonce les règles de l’établissement.
J’ai beaucoup aimé cette nouvelle. l’ambiance instaurée est glaçante : une atmosphère aussi froide que dans les hôpitaux, un lieu désert et inquiétant… J’avoue que l’apparence des patients a probablement aidé.
– Dernière partie – Morgane Scheinmeer
Lucie est maître de jeu pour le jeu de rôle Hyakumonogatori Kaidankai. Jusqu’à présent, elle et ses joueurs ont vécu 99 aventures, affrontant 99 yōkai . Malheureusement, les éditeurs n’ont pas prévu le centième et dernier scénario et la jeune femme a préparé l’ultime intrigue.
Difficile d’être objective pour cette nouvelle que j’ai écrite : je l’adore forcément.
– 1945 – Aaron Judas
Le narrateur est un soldat américain de 17 ans au Japon, en 1945. Il s’est donné pour mission de trouver et sauver la belle Kumiko. Mais ses adversaires sont trop forts et il est vaincu. Ne parvenant plus à avancer, il se voit contraint de quitter le jeu vidéo 1945 pour chercher une solution sur les forums.
Ça commence comme un « récit de guerre »,donc je ne m’attendais pas du tout à ce que ce soit un jeu vidéo. Ce fut une bonne surprise.
Je savais quel yōkai intervenait dans cette nouvelle et j’ai utilisé pas mal d’énergie à essayer de chercher où l’auteur nous emmenait et quel est le lien avec le yōkai choisi. Puis y a eu le déclic, une révélation d’une telle évidence… Et pourtant génialement et progressivement mise en rapport. Je ne comprends pas comment j’ai pu mettre autant de temps pour tilter…
– L’ombre du Kabuki – Caroline Blineau
La narratrice est kuroko, vous savez ces ombres dans le théâtre kabuki chargés de se cacher sur scène pour déplacer discrètement les décors et accessoires. Elle est stressée par la performance de la troupe et craint de faire des erreurs fatales au bon déroulement de la pièce.
J’ai trouvé que cette nouvelle tournait moins autour du yōkai que du kabuki. Bon, faut pas croire, le démon japonais y joue son rôle, mais j’ai moins vu la raison de sa présence. Ça ne m’a pas empêché d’aimer ce récit et surtout l’atmosphère typique au théâtre qui s’en dégage, une ambiance d’ailleurs très différente au début et à la fin.
– Du cœur jusqu’à l’os – Alexandra Fiordelli
Anna est invitée quelques temps à aller chez ses amis Satsuki et son frère Atsuhito dont elle est amoureuse. Une fois sur place le comportement du jeune homme change, il disparaît soudainement et régulièrement.
J’ai relu plusieurs fois le début, parce que je trouvais qu’il manquait des détails sur l’histoire en elle-même comme si on sautait des passages, c’est assez déconcertant. J’ai fini par mettre un mouchoir dessus pour pouvoir profiter pleinement du récit et j’ai bien fait : quelques scènes sont assez dérangeantes dans les descriptions et j’ai adoré ça.
C’est un gros coup de cœur pour cette anthologie. J’ai adoré chacune des histoires et le gros point fort pour moi a été les articles qui suivaient chaque nouvelle et nous présentaient le yōkai choisi par l’auteur. C’était super intéressant.